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Histoire de la navigation : les Rivières de l'Ouest

Pourquoi une plongée sur l’histoire de la navigation sur les Rivières de l’Ouest ? Parce qu’il est toujours bon -pour aller de l’avant- de savoir d’où l’on vient ! Ce petit article ne se veut pas exhaustif et s’appuie sur des sources consultables en ligne, ou sur le site de l’INA … Mais aussi sur des témoignages oraux et écrits, des trésors de savoir que l’on trouve parfois chez des passionnés locaux ! N’hésitez pas à nous partager le vôtre !

La bataille des noms : histoire des Rivières de l'Ouest

D’entrée, les puristes ont déjà sauté au plafond : parler d’histoire avec le terme « Rivières de l’Ouest » (marque déposée en 2020) en fera grincer plus d’un ! Ce n’est pas innocent : l’histoire de notre région, comme beaucoup d’autre, est avant tout le résultat d’une complexe évolution.

Et parfois, le simple fait de nommer est déjà une bataille ! Au fil du temps, les rivières, les territoires et même le réseau de voies navigables ont changé de nom. Parfois pour des questions d’identité, d’autres fois à cause d’une habitude de langage, ou simplement pour s’adapter à l’usage de nos rivières !

Quand on parle de « Rivières de l’Ouest® » aujourd’hui, on fait référence à la partie navigable des rivières Sarthe, Mayenne, Oudon et Maine. Sous le point de vue d’une cohérence de destination touristique.

On vous épargnera aujourd’hui l’intéressante épopée étymologique des noms de chaque rivière. Concentrons nous plutôt sur leur histoire commune (vu depuis la lunette d’un navigant bien sûr !).

Histoire rivières de l'ouest - plan laval
Plan de travaux Laval : 1822 (Source : INA)
Barrage Aiguille
Barrage à aiguille - Ville de Montrichard

Moyen Âge : les cours d'eaux, vecteurs de vie

Avant tout, mettons fin à cette confusion commune que l’on entend parfois. Les Rivières de l’Ouest ne sont pas un réseau de canaux ! Quand on pense « navigation fluviale » on pense souvent aux grands canaux artificiels Français connus … Ce n’est pas le cas ici !

Ce réseau navigable est bien un réseau de rivières naturelles, qui ont été aménagées au fil du temps par l’homme.

Bien avant le Moyen-Âge, les communautés se sont bien souvent installées aux bords de ces cours d’eau. Outre l’apport en eau, nos ancêtres ont bien sûr tiré partie des nombreux avantages des rivières. Leurs sources de nourriture (pêche), la fertilité des terres avec le dépôt de limon, la protection de ces barrières naturelles, etc …

Au Moyen Âge les actuelles Rivières de l’Ouest étaient un axe de transport naturel privilégié. Tout d’abord du fait de la mobilité naturelle qu’apporte ses courants. La flottabilité des embarcations permet également de déplacer facilement des poids importants. Mais aussi (à une époque où les routes sont parfois dangereuses), la rivière constitue un axe sûr pour se déplacer.

Au XVIème siècle, on voit arriver le début de travaux d’importances sur la rivière. Barrages, pertuis à aiguilles et portes marinières font peu à peu leur apparition. Tout cela dans le but de mieux gérer les hauteurs d’eau et les passages « délicats ». À l’époque, c’est déjà une révolution : il faut « seulement » 15 jours pour faire le trajet de Laval à Angers ; et environ 25 pour remonter dans l’autre sens. Pour comparaison, aujourd’hui c’est un trajet qui représente environ une quinzaine d’heure de navigation !

Le 19ème siècle : âge d'or de l'histoire des rivières de l'ouest côté navigation

Quand on parle de navigation fluviale, le 19ème siècle est souvent évoqué comme un tournant majeur, un « âge d’or » comme diraient certains.

De grands travaux d’ouvrages sont entrepris. Parmi eux, on peut citer les nombreux quais, ponts et viaducs, mais aussi et surtout : l’écluse à sas. Cette dernière ressemble peu ou proue aux écluses qui composent, encore aujourd’hui, notre réseau.

La rivière devient un lieu de mobilité important. On généralise les bacs là où il manque des ponts (comme celui de Ménil pour faire passer les ouvriers : un bac qui existe encore aujourd’hui !).

On voit aussi des bouts de notre patrimoine apparaître et disparaître. À Laval par exemple, la construction des quais viennent remplacer les maisons sur pilotis qui subissent régulièrement les dangereuses crues de la Mayenne. Des lavoirs disparaissent ; mais pour les remplacer, apparaissent des bateaux lavoir (comme le Saint-Julien à Laval, qui se visite toujours !).

Se développe aussi la gabare, une embarcation typique des rivières de l’Ouest de la France. Des bateaux de bois à fond plat et un faible tirant d’eau, permettant de porter des charges plus importantes. Sur la partie angevine de la Sarthe, la gabare « La Gogane » propose toujours aujourd’hui des ballades commentées pour les amoureux de la rivières mais aussi de l’histoire locale.

Le chemin de halage

Et bien sûr, les passages de pont limitant (voire empêchant) l’usage de mâts et voiles : il reste le problème de la motorisation. Pour pallier à ces limitations, des chemins de halage et contre-halage sont implantés le long des rivières. Encore aujourd’hui, on en trouve des traces côté Sarthe ; et sur la quasi entièreté de la Mayenne et Maine. Grâce à ces chemins, les gabarres sont tirées à force de bras ou par des chevaux. Le bateau promenade « L’Hirondelle » propose encore dans l’une de ses croisières une démonstration de halage à Grez Neuville.

Toutes ces évolutions font du 19ème siècle un âge d’or du commerce fluvial sur les Rivières de l’Ouest. Charbon, céréales, bois, fer, lin et bien d’autres commencent à affluer vers La Loire et au delà. Certains produits localement réputés, comme le marbre, le vin, le tuffeau, les roses etc … sont exportées ainsi dans le monde entier !

Le 20ème siècle et l'arrivée des chemins de fer

Le 20ème siècle est un point tournant pour la navigation fluviale à l’échelle mondiale ; et les Rivières de l’Ouest ne sont ici pas une exception !

Certaines évolutions technologiques viennent servir la cause du commerce fluvial. Parmi elles : les machines à vapeur puis les moteurs à diesel. Mais aussi les remorqueurs et pousseurs, ces bateaux permettant de tracter plusieurs barges simultanément.

Un premier élément handicape le secteur. Là ou certaines parties de la France sont équipées d’écluses de type dit « Freycinet » ; les Rivières de l’Ouest restent sur un gabarit dit « Becquey ». Ce gabarit (plus court) limite la taille des embarcations pouvant naviguer dans le secteur.

Mais surtout, l’arrivée du chemin de fer va rapidement rendre obsolète le transport fluvial, battant tous ses records de rapidité et de capacité. Une véritable course à la diminution du prix au kilomètre s’engage. Progressivement, le trafic diminue et disparaît peu à peu. Jusqu’au début des années 1970, où les dernières péniches commerciales traversent le réseau des Rivières de l’Ouest. La baisse de fréquentation est aussi un cercle vicieux : moins il y a de trafic et plus il y a d’envasement, de détérioration progressive des équipements, diminuant plus encore l’attractivité de ce moyen de transport.

Histoire rivières de l'ouest : Ecluse de Chateauneuf
Écluse de Châteauneuf Sur Sarthe - Gabarit Becquey
Histoire rivières de l'ouest : Viaduc Mayenne
Viaduc et écluse de Mayenne

La renaissance de l'histoire de la navigation sur les Rivières de l'Ouest : le tourisme fluvial

Inspiré des anglais et du tourisme fluvial (une pratique déjà courante outre-manche), ce loisir commence à faire son apparition en France dés la fin des années 60.

Côté Rivières de l’Ouest, c’est le conseil général de la Mayenne qui lance, le premier, la dynamique en 1976. Des travaux de réhabilitation sont lancés, ainsi que des appels d’offre pour attirer des professionnels. La dynamique se propage rapidement dans les territoires voisins et bientôt nait le début d’une entente entre les départements Sarthe, Mayenne et Maine et Loire sur le réseau de rivière alors appelé « Bassin de la Maine ».

En 1980, nous (Anjou Navigation) nous installons  dans le petit village de Grez Neuville avec une poignée de quelques bateaux, le début d’une épopée qui continue encore aujourd’hui !

De nombreuses activités se développent autour de la rivière : location d’embarquement et de bateaux habitables, clubs sportifs, infrastructures de pêche, etc …

1976 : Le Conseil Général de Mayenne lance une nouvelle dynamique (Source : INA)
anjou navigation
1980 : Anjou Navigation démarre l'aventure (Source : INA)

Le XXIème siècle : élans collectifs

Avec le nouveau siècle, de nouveaux enjeux permettent à notre secteur de se démarquer.

Loin des réseaux navigables détenus par le gros opérateur VNF, notre bassin de navigation reste encore géré localement par les départements traversé par les rivières (Sarthe, Mayenne et Maine-et-Loire). Une spécificité de la région qui fait la fierté des pratiquants, car elle est un gage de qualité et de suivi !

En outre, la labellisation de la zone Natura 2000 des Basses Vallées Angevines (un peu moins de 10 000 hectares) vient amorcer une dynamique de préservation du Sud de notre réseau. Un secteur connu pour ses grandes étendues d’eaux et son patrimoine naturel (flore et faune) protégé.

Histoire rivières de l'ouest
La Sarthe, la Mayenne et l'Anjou inaugurent la destination "Rivières de l'Ouest"

Peu à peu, les territoires prennent conscience de l’attractivité touristique de la destination. En 2019, l’initiative Rivières de l’Ouest® est lancée ! La Sarthe, la Mayenne et le Maine et Loire décident de se rassembler autour d’un nom et projet commun pour mutualiser les efforts. Après une série de recherches pour trouver les points communs des territoires et créer une identité forte, une communication régionale nationale est lancée. En 2022, une grande étude est amorcée pour faire un état des lieux des équipements du réseau « fluvestre ». C’est à dire : toutes les activités qui touchent de près ou de loin à la rivière (les bateaux bien sûr, mais aussi les voie vertes, la pêche, les activité sportive, etc …). De belles perspectives de développement sont donc encore devant nous !

Un regard vers l'avenir : de nouveaux challenges

Notre époque est celle aussi de l’apparition de nouveaux risques et impacts liés au dérèglement climatique. Et les réseaux de rivières ne sont pas épargnés par ces nouveaux enjeux ! Les épisodes de crues, bien que naturellement présent bien avant notre époque, tendent à s’accentuer et devenir plus imprévisibles. Mais aussi et surtout, des épisodes de sécheresse viennent toucher notre réseau.

En 2022, les fortes canicules estivales qui touchent l’Europe impactent pour la première fois la navigation dans notre région d’une telle manière. La variété géographiques des affluents du bassin, qui d’ordinaire nous protège de la sécheresse, n’arrivent plus à alimenter suffisamment. Pour la première fois, des restrictions nécessaires sont mises en place pour les navigants. Provoquant d’abord des inquiétudes, cette période s’est révélée finalement être une franche réussite de coopération entre les opérateurs et les usagers de la rivière. Le rôle de l’éclusier devient ici primordial (un gros avantages de la région qui maintient toujours des éclusiers en place). Rassemblant les bateaux aux écluses pour limiter le nombre d’éclusage ; navigants et éclusiers communiquent entre eux pour anticiper les passages de chacun. Les retours des équipages qui reviennent au port sont unanimes : c’est une franche réussite !

Ces sécheresses sont aussi des terrains propices au développement de cyanobactéries (chaleur, stagnation de l’eau due à la baisse de niveau des rivières). Ces bactéries d’ordinaires présentent en faibles quantité, se développent rapidement dans ces conditions. Parant alors les eaux de leur couleur verte dû à la chlorophylle qu’ils synthétisent, la toxicité de l’eau augmentant peut devenir un risque pour l’homme et certains animaux.

Ces problématiques nouvelles deviennent de véritables enjeux pour demain, incitant tous les acteurs à réfléchir au sujet du partage de l’eau. Mais aussi à remettre en cause nos pratiques individuelles et collectives : leurs impacts -directs et indirects- sur notre environnement.

Partagez nous votre histoire sur les Rivières de l'Ouest !